Le centre hospitalier Nord-Deux-Sèvres devra indemniser vingt infirmiers anesthésistes pour le préjudice financier résultant de l’absence de paiement de certaines heures de travail.
L’essentiel :
Par vingt jugements du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a condamné le centre hospitalier Nord-Deux-Sèvres (CHNDS) à indemniser des infirmiers anesthésistes du préjudice résultant de l’absence de paiement d’heures travaillées pendant les gardes de nuit. Ces condamnations couvrent la période 2012-2016. Elles varient, selon la situation de chaque infirmier, entre 4 000 et 70 000 euros par requérant, intérêts compris. Le montant total des condamnations s’élève à 568 000 euros.
Les faits et la procédure :
Entre 2012 et 2016, les infirmiers anesthésistes du CHNDS étaient appelés à réaliser, une fois par semaine environ, des gardes de 24 heures. Les heures de ces gardes réalisées entre 20h et 8h du matin étaient considérées par le CHNDS comme des heures d’ « astreinte sur site » et étaient indemnisées au titre d’une « indemnité de permanence » représentant 50 % du taux horaire normal de chaque agent.
Estimant que ces heures auraient dû être payées comme des heures de travail normales, vingt infirmiers ont demandé au tribunal de condamner le CHNDS à les indemniser du préjudice financier qu’ils ont subi.
Après l’audience publique qui s’est tenue le 19 septembre 2019, le tribunal a, par vingt jugements du 3 octobre 2019, condamné le CHNDS à indemniser les infirmiers requérants.
Les raisons de la condamnation :
Le tribunal a estimé que le décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 distingue, s’agissant du temps de travail des agents de la fonction publique hospitalière, deux cas. Soit ces agents sont en situation de travail effectif, c’est-à-dire qu’ils sont présents sur leur lieu de travail et sont à la disponibilité permanente et immédiate de leur employeur, et ils doivent alors être rémunérés normalement. Soit ils sont d’astreinte, ce qui signifie qu’ils peuvent quitter l’hôpital mais qu’ils doivent être en mesure de s’y rendre rapidement en cas de nécessité, et ils reçoivent alors une indemnité d’astreinte. Le tribunal a précisé qu’il n’existe aucune autre modalité d’organisation du travail. En particulier, il n’existe plus, comme c’était le cas avant 2002, de régime de permanence impliquant une présence de l’agent sur le lieu de travail sans pour autant que celui-ci travaille de manière continue.
En l’espèce, les infirmiers anesthésistes du CHNDS n’avaient pas le droit, durant leurs gardes nocturnes, de quitter l’hôpital. Ils devaient en outre être immédiatement disponibles pour parer aux urgences, notamment pour les sorties du véhicule du SMUR ou pour les codes rouges de la maternité. Le tribunal a donc estimé qu’ils n’étaient pas d’astreinte mais qu’ils étaient en situation de travail effectif. C’est la raison pour laquelle il a condamné le CHNDS à indemniser les vingt infirmiers requérants.
Le calcul du préjudice :
Les indemnités allouées par le tribunal sont moitié moins élevées que les sommes demandées par les infirmiers requérants. Cette différence s’explique par des divergences entre le mode de calcul utilisé par les requérants et celui retenu par le tribunal.
En particulier, alors que les requérants estimaient que l’ensemble des heures devaient être payées suivant la réglementation relative aux heures supplémentaires, qui prévoit une forte majoration pour les heures réalisées de nuit (entre 21h et 7h), le tribunal a estimé que les heures en cause ne répondent pas aux critères des heures supplémentaires.
En outre, le tribunal a relevé que les indemnités de permanence qui ont été versées aux infirmiers requérants pour les heures en cause doivent être déduites des indemnités auxquelles ils ont droit. Or, si les requérants avaient déduit ces indemnités, le tribunal a estimé que ces déductions étaient erronées et a retenu des déductions plus importantes.
Finalement, le CHNDS est condamné à verser des indemnités allant de 4 000 à 70 000 euros.
Ces indemnités varient selon la situation de chaque infirmier, en particulier la durée pendant laquelle il a été employé par l’hôpital.
Le montant total des condamnations s’élève à 568 000 euros. Ces sommes comprennent les intérêts.