Le tribunal rejette les requêtes introduites par 28 anciens dockers du port de La Rochelle qui demandaient réparation à l’Etat du préjudice d’anxiété subi du fait de leur exposition aux poussières d’amiante.
Le port de la Rochelle-La Pallice a été reconnu, par trois arrêtés interministériels publiés en 2005, 2011 et 2021, comme un site sur lequel les travailleurs ont été exposés à l’inhalation de poussières d’amiante.
28 dockers de ce port, qui n’ont pas contracté de maladie due à l’amiante, ont demandé en septembre 2021 la condamnation de l’Etat à verser à chacun d’eux une indemnité de 27 000 euros en réparation du préjudice d’anxiété et des troubles dans les conditions d’existence qu’ils disent subir du fait de leur crainte de contracter une maladie grave due à l’amiante. Ils ont invoqué les fautes commises par l’Etat en ne prenant pas de réglementation suffisante pour interdire l’usage de ce matériau dangereux et en ne faisant pas suffisamment contrôler par l’inspection du travail leurs conditions de travail sur le port.
Le ministère du travail a opposé en défense la prescription de leur action, acquise, selon les dispositions de la loi du 31 décembre 1968, quatre ans après que le demandeur a pu avoir pleine conscience du préjudice subi.
Faisant application des principes posés par un avis du Conseil d’Etat du 19 avril 2022, le tribunal juge que pour 26 des 28 requérants, qui n’ont plus travaillé sur le port de La Rochelle après 1999, leur action est tardive dès lors qu’ils doivent être considérés comme ayant eu pleinement connaissance du dommage subi dès la publication de l’arrêté du 4 mai 2011 qui inscrit le port de La Rochelle sur la liste des sites dont les travailleurs ont été exposés à l’amiante durant la période 1974-1999. Le délai de quatre ans dont ils disposaient pour demander réparation a donc pris fin le 31 décembre 2015. Accès aux décisions.
Pour les deux autres requérants, qui ont travaillé sur le port de La Rochelle après 1999, l’arrêté du 27 décembre 2021 qui a prolongé la période pendant laquelle a été reconnue une exposition à l’amiante sur le port, désormais fixée « de 1974 à 2004 », a eu pour effet de faire courir un nouveau délai de prescription de quatre ans. Toutefois, un préjudice moral résultant de la crainte de développer une pathologie grave ne peut être indemnisé que s'il présente un caractère direct et certain avec les fautes invoquées. Or, le tribunal a estimé que le lien direct entre les fautes reprochées aux services de l’Etat et les préjudices moraux invoqués par les requérants, salariés d’entreprises privées auxquelles incombe en premier lieu leur protection, n’était pas établi. Accès à ces décisions.