Instruction en famille : saisi de 32 recours, le tribunal administratif annule 17 refus d’autorisation du rectorat.

Décision de justice
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Au cours des audiences du 13 et du 27 mars 2025, le tribunal administratif de Poitiers a examiné 32 affaires portant sur des refus du rectorat de l’académie de Poitiers d’accorder des autorisations d’instruction en famille. Par des jugements du 10 avril 2025, le tribunal a annulé 17 décisions du rectorat, soit en raison d’une irrégularité de procédure, soit du fait d’une erreur d’appréciation quant à la situation de l’enfant. Il a validé les autres refus.

La loi du 24 août 2021 confortant les principes de la République conditionne désormais l’instruction en famille à une autorisation des services de l’éducation nationale. Jusque-là, depuis la loi du 28 mars 1882 sur l’organisation de l’enseignement primaire, qui a instauré non pas l’école obligatoire, mais l’instruction obligatoire des enfants, le choix des parents de recourir à cette instruction en famille était soumis à une simple déclaration, même si elle donnait lieu chaque année à des contrôles de l’administration.

L’article L. 131-5 du code de l’éducation énonce les quatre motifs pour lesquels cette autorisation d’instruction en famille est accordée :

1° L'état de santé de l'enfant ou son handicap ;

2° La pratique d'activités sportives ou artistiques intensives ;

3° L'itinérance de la famille en France ou l'éloignement géographique de tout établissement scolaire public ;

4° L'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif.

Ce sont les refus opposés sur le quatrième motif qui ont donné lieu à de nombreuses contestations de familles. Le tribunal s’est prononcé sur celles-ci en référé dès l’été 2024, avant de le faire au fond à l’issue des deux audiences des 13 et 27 mars 2025.

Le tribunal a d’abord rappelé que c’est la « situation propre à l’enfant » qui doit justifier le projet éducatif, dont le contenu n’est examiné que dans un second temps.

Le tribunal a ensuite jugé que pour apprécier la « situation propre à l’enfant », il y a lieu de prendre en compte d’abord les particularités de l’enfant lui-même ou de sa situation familiale, qui doivent être étayées par des pièces suffisamment probantes. Les services de l’éducation nationale peuvent également prendre en considération d’autres éléments tels que la situation scolaire de l’enfant au cours des années précédentes, les appréciations portées au cours des années précédentes par les autorités chargées du contrôle de l’instruction en famille sur la pertinence de cette instruction au regard des particularités de l’enfant, ainsi que la situation de la fratrie. Enfin, l’administration doit apprécier la qualité de projet pédagogique et les capacités des parents à assurer l’instruction de leur enfant.

Cette grille de lecture a conduit le tribunal à valider 15 refus d’autorisation d’instruction en famille. En revanche, dans 7 dossiers, le tribunal a considéré, contrairement au rectorat, que la « situation propre à l’enfant » justifiait qu’une autorisation d’instruction en famille soit accordée à ses parents. Il a, dans ces cas, ordonné à l’administration de délivrer les autorisations pour l’année scolaire en cours.

Enfin, dans 10 dossiers, le tribunal a constaté que le rectorat n’apportait pas la preuve que la commission académique, ayant statué sur le recours administratif préalable des familles, était régulièrement composée. La réunion de cette commission constituant une garantie pour les parents, le tribunal a ordonné à l’administration de réexaminer les demandes des familles concernées dans un délais de deux mois.