Le tribunal rejette la requête de l’ancien exploitant, devenu Alcatel Lucent participations, contre l’arrêté de la préfète de la Charente le mettant en demeure de remettre en état l’ancien site de production des piles « Leclanché » à Saint-Cybard (TA de Poitiers, 1ère chambre, jugement n°2002052 du 6 décembre 2022).
Selon une étude réalisée en 2011 à l’initiative de la préfecture de la Charente, le sol et les eaux souterraines du quartier de Saint-Cybard, à Angoulême, ont été pollués par du trichloroéthylène, solvant cancérogène, à l’emplacement de l’ancien site industriel des piles « Leclanché » (SAFT), actif jusqu’en 1984. Des investigations réalisées auprès d’anciens employés ont révélé que d’importantes quantités de ce solvant, utilisé pour nettoyer les accumulateurs avant leur passage en ateliers de peinture, étaient ensuite déversées directement dans le sol. La société Alcatel Lucent participation, ayant-droit de l’ancienne société SAFT, s’était déjà engagée à participer matériellement et financièrement aux opérations de réhabilitation du site et à sa dépollution, dans le cadre d’un accord conclu avec le conseil départemental de la Charente le 18 juillet 2019. Par un arrêté du 12 mars 2020 pris sur le fondement de l’article L. 512-19 du code de l’environnement, la préfète de la Charente l’a, en outre, mise en demeure de formaliser la mise à l’arrêt définitive du site de Saint-Cybard et de lui notifier les mesures prises pour assurer la mise en sécurité de ce site, en particulier l’évacuation des produits dangereux, les interdictions ou limitations d’accès au site, la suppression des risques d’incendie et d’explosion et la surveillance des effets de l’installation sur l’environnement.
Dans son jugement n°2002052 du 6 décembre 2022, le tribunal rejette la requête d’Alcatel Lucent participation dirigée contre cet arrêté en retenant, notamment, sur le fondement des jurisprudences Société Alusuisse-Lonza-France » (CE, 8 juillet 2005, n° 247976, au Rec.) et « Commune de Marennes » (CE 13 novembre 2019, n° 416860, au Rec.) que l’action de l’Etat n’est pas prescrite, faute pour l’exploitant d’avoir déclaré à l’autorité préfectorale sa cessation d’activité conformément à l’article 34 du décret n° 77-1133 du 21 décembre 1977 pris pour l’application de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées. Le tribunal confirme également l’existence d’un lien de causalité entre la pollution et les activités de l’usine SAFT, l’épicentre de la pollution correspondant précisément à l’endroit où, selon les témoignages recueillis, le trichloroéthylène usagé était déversé par l’entreprise à même le sol. Le tribunal estime enfin que les mesures prescrites n’ont aucun caractère disproportionné dès lors qu’elles n’excèdent pas celles prévues par l’article R. 512-66-1 du code de l’environnement, auxquelles la société Alcatel Lucent participations, en tant qu’ayant-droit de l’ancienne SAFT, devait, de toute façon, légalement se conformer.