Par une ordonnance du 7 août 2023, la juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a suspendu l’exécution de l’arrêté du 11 juillet 2023 pris par le maire d’Angoulême, d’une part, en tant qu’il s’applique à certains espaces publics, et d’autre part, en tant qu’il prohibe « la station assise ou allongée lorsqu’elle constitue une entrave à la circulation des piétons et à l’accès aux immeubles riverains des voies publiques, ainsi que la station debout lorsqu’elle entrave manifestement la circulation des personnes, la commodité de passage, la sureté dans les voies et espaces publics ».
Par un arrêté du 11 juillet 2023, le maire d’Angoulême a interdit dans cinq secteurs du territoire communal, d’une part, toute occupation abusive et prolongée des espaces publics de nature à porter atteinte à la tranquillité publique et au bon ordre public, et d’autre part, « la station assise ou allongée lorsqu’elle constitue une entrave à la circulation des piétons et à l’accès aux immeubles riverains des voies publiques, ainsi que la station debout lorsqu’elle entrave manifestement la circulation des personnes, la commodité de passage, la sureté des voies et espaces publics ». Ces interdictions sont applicables tout au long de l’année de 10 heures à 21 heures en automne et en hiver et jusqu’à 2 heures du matin au printemps et en été.
La Ligue des droits de l’homme, au soutien de laquelle sont intervenues notamment la Fondation Abbé-Pierre et la Fédération nationale Droit au logement, a demandé au juge des référés de suspendre l’exécution de cet arrêté.
Au sein de l’espace public, chacun jouit des libertés garanties par la loi. Les maires, dans le cadre de leur mission de maintien de l’ordre, ne peuvent y porter atteinte que pour prendre des mesures adaptées, nécessaires et proportionnées. Ces mesures doivent tenir compte des circonstances de temps et de lieu et être justifiées par des impératifs d’ordre public.
Pour justifier au cas d’espèce les restrictions apportées par son arrêté à la liberté d’aller et venir et à la liberté de réunion, le maire d’Angoulême a fait valoir que des groupes d’individus, immobiles ou peu mobiles, accompagnés ou non d’animaux, présentent un comportement générateur de nuisances, que ces nuisances font l’objet de nombreuses plaintes et pétitions de riverains et commerçants auprès de la mairie ou de la police municipale et que cette dernière constate quotidiennement leur réalité par des mains courantes.
La juge des référés a estimé d’une part, qu’il ressortait des pièces du dossier, et en particulier du contenu des nombreuses mains courantes produites, que les troubles à la tranquillité et au bon ordre publics étaient établis dans trois des secteurs, dont le centre-ville, mais qu’en revanche, ces mêmes troubles ne l’étaient pas dans les deux autres secteurs, dont celui de la gare SNCF, et que, par suite, dans ces deux secteurs, les mesures édictées n’étaient pas nécessaires.
La juge des référés a estimé d’autre part, que l’interdiction visant « la station assise ou allongée lorsqu’elle constitue une entrave à la circulation des piétons et à l’accès aux immeubles riverains des voies publiques, ainsi que la station debout lorsqu’elle entrave manifestement la circulation des personnes, la commodité de passage, la sureté dans les voies et espaces publics » présentait un caractère trop général et insuffisamment précis et, par suite, portait une atteinte disproportionnée à la liberté d’aller et venir et à la liberté de réunion au regard de l’objectif de sauvegarde de l’ordre public poursuivi.
Eu égard à la situation d’urgence créée par la limitation substantielle et durable à la liberté d’utiliser et d’occuper l’espace public apportée par l’arrêté contesté, la juge des référé en a suspendu partiellement l’exécution dans l’attente de la décision qui sera rendue au fond, limitant ainsi provisoirement son champ d’application comme sa portée.